"Mme Élisabeth Borne, féministes, nous inquiétons de ce que devient le Planning familial"

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Madame Élisabeth Borne,

Nous vous remercions d’avoir effectué l’un de vos premiers déplacements en tant que Première ministre au Planning familial dans un contexte mondial où le droit à l’avortement régresse. Nous voulons néanmoins attirer votre attention sur les dérives de cette institution. La polémique récente au sujet du Planning familial se base sur le visuel ci-dessous, sur lequel on peut voir un « homme enceint », c’est-à-dire une femme (femelle) transidentifié.

Cette affiche n’est pas un hasard. Elle reprend un vocabulaire utilisé par les militants transactivistes. Sa publication est donc l’occasion de vous alerter sur les problématiques que soulève l’idéologie transactiviste qui est en train de parasiter cette institution.


1. Le planning familial fait désormais passer la biologie au second plan

Seules les femmes, c’est-à-dire les femelles adultes humaines peuvent être enceintes. Un homme, c’est-à-dire un mâle ne pourra jamais l’être. Affirmer le contraire est scientifiquement parlant un mensonge. Nous pensons évidemment que toutes les femmes doivent pouvoir avoir accès au planning familial, ce qui inclut les femmes transidentifiées. Mais encore une fois, les hommes (les mâles) ne peuvent pas être enceints, et cela malgré le fait que certaines personnes aient pu administrativement obtenir des papiers d’identité disant qu’elles sont désormais hommes lorsque leur sexuation est toujours femelle. Nous nous retrouvons donc face à une impasse où la réalité administrative et la réalité biologique et scientifique ne coïncident plus et cette affiche du Planning familial en est le parfait reflet.

En tant que féministes, nous nous battons pour l’abolition des stéréotypes de genre, pas pour qu’ils soient renforcés comme le prône le transactivisme. Nous considérons que ce qui nous relie toutes, c’est notre sexe, pas un goût prononcé pour la couture, le rose et les poupées Barbie. Nous considérons que les hommes devraient avoir le droit de pleurer en public, de porter des jupes et de faire de la gymnastique sans être insultés de « fillettes » ou de « pédales ». Nous pensons qu’il faut changer les mentalités plutôt que de changer les corps. Si l’on abolit ces stéréotypes, les transitions auront beaucoup moins lieu d’être.

Affirmer que les femmes ne sont pas nécessairement des femelles et vice versa relève de la croyance, pas de la biologie. Les croyances n’ont pas leur place dans les établissements chargés de missions de service publiques déléguées. C’est le principe de la loi de 1905. Vous conviendrez qu’une idéologie qui relève de la croyance n’a pas à s’immiscer dans la politique du Planning familial, association financée en grande partie par des fonds publics.


2. Le planning familial contribue à effacer les femmes par le langage

Dans le lexique du Planning Familial, on peut lire que « le sexe est un construit social », que « le sexe est un spectre », qu’un homme gay « peut avoir une vulve », qu’un couple de lesbiennes peut être composé d’une femme et d’une femme trans (c’est-à-dire un mâle). Le Planning familial invite également à ne plus utiliser les mots « mâle » et « femelle ».

Captures d’écran du "Lexique Trans"du Planning Familial

Nous avons remarqué que le Planning familial utilise désormais des termes comme « personne menstruée », ou « personnes qui ont un utérus » pour définir les femmes. Nous nous opposons à cette sémantique qui découpe les femmes. Nous voulons être considérées comme des êtres entiers et pas comme des vagins sur pattes.

Post Facebook du Planning Familial datant du 26 Décembre 2020

Site internet du Planning Familial

Nous pensons que le mot femme doit continuer à représenter notre sexuation, c’est-à-dire le sexe femelle. Par esprit scientifique d’abord. Et aussi par respect pour toutes celles que l’on excise, que l’on viole, que l’on vend et que l’on prostitue sans leur demander leurs pronoms avant. Nous sommes toutes des femmes très différentes. Mais nous avons un point commun : notre sexe longtemps désigné comme faible, le sexe féminin. Nous refusons que le mot qui nous relie soit effacé au profit d’étiquettes qui nous divisent. Nous regrettons qu’une institution historique comme le Planning Familial fasse fi de l’universalisme sur lequel elle s’est construite.

3. Le planning familial fait croire aux femmes qu'on peut naître dans le mauvais corps

Valider l’idée que l’on peut « naître dans le mauvais corps » est dangereux et maltraitant pour les personnes souffrant de dysphorie de genre. La dysphorie de genre est un trouble psychiatrique qui touche certaines personnes trans et leur procure une profonde détresse due au fait qu’elles ne se reconnaissent pas dans l’identité de genre accolée à leur sexe. Or, de la même façon qu’on ne peut pas changer d’âge, on ne peut pas changer de sexe. Le sexe est immuable chez les mammifères que nous sommes.

Nous pensons que personne ne peut naître dans le mauvais corps. Nous comprenons néanmoins que certaines puissent se sentir mal dans les leurs, et que c’est important de leur proposer un accompagnement psychologique plutôt qu’un traitement mutilant. Au Royaume-Uni, la plus grande « clinique du genre » (Tavistock) a été contrainte de fermer ses portes car elle est poursuivie en justice par plusieurs centaines de familles qui estiment que ses médecins ont poussé leurs enfants mineurs à transitionner. C’est un véritable scandale sanitaire dont le Planning familial devrait prendre note.

Parmi d’autres exemples : la Suède qui était à la pointe dans les transitions de genre et les a arrêtées en mars dernier pour les mineurs, estimant que les conséquences sur leur santé pouvaient être graves. La Finlande n’en fait plus avant 25 ans, avec l’argument que le cerveau humain n’est pas terminé avant. C’est pourquoi nous espérons que le Planning familial ne s’apprête pas à se transformer en officine où l’on distribue piqûres de testostérone et d’œstrogène à tout va comme c’est déjà le cas dans certains cabinets médicaux.

Certaines personnes transitionnent sans effectuer de modifications corporelles, mais beaucoup suivent des traitements hormonaux. Les transformations dues à la prise de testostérone chez les femmes sont IRRÉVERSIBLES après quelques mois :

- augmentation de la taille du clitoris qui peut créer des douleurs intenses ;

- douleurs pelviennes intenses ;

- apparition d’une pilosité importante sur plusieurs parties du corps, notamment le visage ;

- changement de voix.

En plus de cela, le port du binder (corset visant à aplatir les seins) peut entraîner des problèmes de santé grave : déformation des seins, côtes cassées, problèmes respiratoires. Les mutilations peuvent aussi être chirurgicales : ablation des seins, de l’utérus, de la vulve (autrefois appelée excision), et ablation du pénis pour les hommes.

Nous avons discuté avec des mères du collectif Ypomoni (collectif de parents inquiets pour leurs enfants en transition). Elles nous ont raconté que les enfants concernés sont des filles pour les trois quarts des cas, qui présentent souvent d'autres troubles : autisme, troubles du comportement alimentaire, anxiété. Des filles qui ont eu une difficulté à accepter le changement de leurs corps durant la puberté (et étant donné l’état de ce monde, nous les comprenons), des filles qui ont souvent eu des problèmes relationnels et d’intégration dans un groupe. Des adolescentes dans un état de souffrance réelle, qui doivent être accompagnées de manière globale et non en ayant recours à des chirurgies sur un corps sain. Plus de la moitié de ces adolescentes ont déclaré être attirées par les filles.

Nous sommes inquiètes pour les adolescentes qui se rendraient au Planning familial en présentant de tels symptômes. Nous considérons qu’encourager des jeunes femmes qui ont du mal à accepter leur orientation sexuelle à transitionner relève de la thérapie de conversion. La mission du Planning familial est d’accompagner les femmes et adolescentes durant l’IVG, ainsi que de garantir la santé sexuelle des personnes accompagnées, pas de les aider à se détruire.

Dans un contexte où 130 centres IVG ont fermé ces 15 dernières années en France et où aucun n’est à l’abri de subir les fameuses prières de rue de catholiques intégristes, les missions pour lesquelles le Planning familial reçoit de l’argent public ne doivent pas passer au second plan. Nous regrettons que leurs efforts de communication soient mis au service d’une idéologie qui affirme que l’on peut naître dans le mauvais corps, plutôt qu’à réaffirmer qu’avorter est un droit fondamental pour les femmes. Aujourd’hui beaucoup s’inquiètent de ce que devient cette institution historique, et cela dépasse largement le cercle des féministes. Plusieurs députés, y compris des membres de votre parti, ont accepté de nous rencontrer et partagent nos inquiétudes.

Chère Madame Borne, nous vous demandons d’y réfléchir et de réagir. Nous vous remercions pour votre attention et nous nous tenons à votre disposition si vous souhaitez échanger.

Dora Moutot & Marguerite Stern

Dora Moutot et Marguerite Stern sont les deux fondatrices de Femelliste. Vous pouvez soutenir le travail de Dora Moutot sur Tipee. Vous pouvez soutenir le travail de Marguerite Stern sur Patreon.

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Quelles sont les différences physiques entre femmes et hommes ?