Prisha Mosley, détransitionneuse : “J’ai décidé de parler publiquement pour transformer l’horreur que je vis en quelque chose de positif.”

Depuis quelques années, les voix des personnes détrans s’élèvent sur internet. Être “détrans”, c’est avoir voulu changer de sexe, avoir souvent pris des traitements hormonaux et/ ou subi des chirurgies dites de “réassignation sexuelle”, puis finalement faire machine arrière. Pourquoi ? Les causes sont multiples, mais parmi tous les témoignages, on retrouve les points communs suivants : phénomène d’emprise sectaire sur les réseaux sociaux qui conduisent à faire de mauvais choix ; troubles du comportements alimentaire, troubles psychiques, état de stress-post traumatique diagnostiqués comme “dysphorie de genre” (voir Lexique) ; corps médical qui encourage les transitions des plus jeunes ; pression sociale, etc. Malgré les menaces et les injures, certaines osent parler de leurs parcours, et dénoncer publiquement ce qu’elles ont subi.

C’est le cas de Prisha Mosley. Elle a actuellement 24 ans et vit dans le Michigan aux États-Unis. Je l’ai découverte via son compte Twitter et sa chaine Youtube où elle partage quotidiennement ses difficultés, ses souffrances et ses réflexions, s’adressant tour à tour aux ados, aux parents d’enfants trans, au monde entier, afin d’alerter et d’aider des enfants qui vivent des situations similaires à la sienne il y a quelques années.

Entretien avec une battante.



Prisha, pouvez-vous nous raconter l’histoire de votre transition ? Comment cela a commencé ? À quelle période de votre vie ? Quels étaient vos liens avec votre famille ?

J’ai commencé à croire que j’étais un garçon à l’âge de 15 ans. J’ai été médicalisée à l’âge de 17 ans. J’ai arrêté la testostérone à l’âge de 22 ans en secret, et j’ai commencé à m’exprimer publiquement sur ma détransition il y a environ 6 mois, à l’âge de 24 ans.

Mes parents, et ma mère en particulier, n’ont jamais cru que j’étais trans ou que j’étais un garçon, mais le corps médical leur a affirmé que je me suiciderai la prochaine fois qu’ils s’opposeraient à ma nouvelle identité. Je n’ai pas écouté ma mère parce qu’elle était alcoolique et toxicomane à l’époque, donc je n’avais aucune confiance en elle, et j’étais en colère contre elle. Les relations avec ma famille étaient plutôt pauvres et malsaines.

Comment s’est comporté le monde médical ?

Dès mon premier rendez-vous médical qui a duré 15 minutes avec une “experte en transition de genre”, j’ai été diagnostiquée comme dysphorique. Cette “experte” m’a dit que la chirurgie “du haut” et “du bas” était la meilleure solution pour moi. Elle m’a donné une ordonnance pour un traitement hormonal et chirurgical, tout cela durant le même rendez-vous. Elle m’a également fourni de la testostérone.

J’étais alors vraiment en état de malnutrition sévère, en très mauvaise santé physique et mentale. Je consultais déjà plusieurs spécialistes pour des problèmes de troubles du comportement alimentaire et des problèmes de santé mentale. On m’a dit que tout cela disparaitrait dès que j’aurais commencé ma transition, alors j’y ai cru.


Quand, comment et pourquoi avez-vous décidé de détransitionner ?

J’ai arrêté la testostérone en secret à l’âge de 22 ans. Je ne l’ai dit à personne parce que je ne voulais pas qu’on essaye de m’en dissuader. J’ai coupé le contact avec celles et ceux qui me disaient que j’étais un homme trans. J’ai arrêté tout cela pour revenir à moi-même.

J’ai pris cette décision après avoir reçu le diagnostic d’un trouble de la personnalité borderline et d’un état de stress post-traumatique. J’ai subi des violences sexuelles, y compris des viols durant mon enfance, et cela a entrainé beaucoup de traumatismes chez moi. Je souffrais aussi d’une anorexie sévère et de dysmorphophobie (la dysmorphophobie se caractérise par le fait d’avoir une image déformée de son propre corps, et par une exagération psychique de défauts physiques).

Ces troubles étaient les véritables raisons de mon mal être. Et lorsque je les ai soigné, j’ai enfin ressenti le soulagement qu’on m’avait dit que je ressentirai en transitionnant.

4/ Sur votre compte Twitter, vous avez affirmé “On m’a mal diagnostiquée, on m’a dit que je souffrais de dysphorie de genre, alors que je souffrais en réalité de dysmorphophobie, et maintenant je me retrouve à réellement souffrir de dysphorie de genre parce qu’on m’a mutilée.”. Pouvez-vous nous expliquer cela ?

Ce qu’on a appelé “dysphorie de genre” n’en était pas. C’était en réalité de la dysmorphophobie, et cela venait de mon anorexie. Je pensais que j’étais grosse alors que j’étais en fait dans un état de malnutrition grave. Par contre, maintenant je souffre réellement de dysphorie de genre parce que mon corps n’est plus du tout en accord avec ma réalité sexuée. Je suis née femelle, mais je vis maintenant dans un corps qui présente des caractères sexuels secondaires mâles : je n’ai plus de seins et mon corps est totalement déformé. J’ai l’impression de ressembler à un homme et cela me créé de la dysphorie.

Pouvez-vous lister les effets indésirables irréversibles du traitement hormonal qui vous a été administré ?

D’un point de vue psychique / émotionnel : je suis devenue impulsive, agressive, frustrée, plus agitée, facile à mettre en colère.

D’un point de vue physique : des poils ont poussé partout sur mon corps, et particulièrement sur mon visage. J’ai des douleurs chroniques au cou, aux épaules, au dos, aux hanches, aux parties génitales. Certaines parties de mes organes génitaux se sont atrophiées. J’ai des douleurs, des déchirures et des saignements lorsque j’ai des rapports sexuels. Les proportions de mon corps ont totalement changé : j’ai maintenant un cou et des épaules plus larges. Je me sens maladroite dans ce nouveau corps, je ne le supporte pas. Ma voix a changée, elle est devenue plus grave et a perdu en volume ; j’ai mal à la gorge. J’ai perdu des cheveux, ils se sont affinés, j’ai un début de calvitie. J’ai de l’acné. Mon odeur corporelle a changée. J’ai pris du poids et des muscles.

Qu’en est-il de votre santé maintenant ?

Je suis en très mauvaise santé. Mes hormones ne se régulent plus correctement, et mes médecins ne semblent pas capables de gérer la situation : ils me font passer les mauvais examens, en oublient certains. J’ai l’impression que personne n’est apte à m’aider, je ne sais vraiment plus du tout où j’en suis niveau santé.

Je me sens nulle dans ce corps. Je souffre. Je ne m’aime pas. Je ne me reconnais plus dans le miroir. C’est le pire état de santé mentale que j’ai jamais connu.

Pourquoi pensez-vous qu’autant de jeunes personnes veulent transitionner ?

Parce que la transition apporte une solution à celles et ceux qui souffrent, en particulier au moment de la puberté. Le fait de transitionner est incroyablement glorifié et glamorisé, et les personnes trans sont vénérées. Il existe une sorte de culte qui attire les enfants vulnérables et traumatisés.

Quels conseils donneriez-vous à des parents dont les enfants veulent transitionner ?

Quoi qu’il arrive, n’encouragez pas cela. Apportez leur un amour inconditionnel et chérissez-les tout en validant leur sexuation. Célébrez-les. Dites leur que vous les aimerez quoi qu’il arrive, mais que vous ne voulez pas qu’ils aient besoin de soins médicaux pendant tout le reste de leurs vies. Il y a de fortes chances pour qu’ils regrettent cela s’ils le font. Il faut au moins qu’ils attendent d’être adultes et de bénéficier de soins psychiques avant de s’engager dans un tel parcours, car cela réduira le risque de prendre une mauvaise décision et de la regretter un jour.

Pourquoi avez-vous décidé de parler publiquement ? Recevez-vous des injures et des menaces à cause de cela ?

J’ai décidé de parler publiquement parce que j’avais besoin de transformer l’horreur que je vis en quelque chose de positif. J’essaye de sauver des enfants et des personnes qui sont en mauvaise santé mentale. Cela doit cesser.

Je reçois énormément de haine pour cela. Les gens se moquent de moi et me tournent au ridicule. Ils m’envoient des menaces. Ils me disent que je suis affreuse. Mais cela vaut quand même le coup : je pense juste aux enfants que j’aide.



Durant son parcours de transition, Prisha Mosley a subi une ablation des seins. Aujourd’hui, elle ressent une profonde détresse à cause de cela. Sur son compte Twitter, elle parle de sensation de “seins fantômes”. La sensation d’avoir un “membre fantôme” est un phénomène psychique bien connu dans le cas d’amputations et désigne le fait de continuer à ressentir la présence du membre amputé.

Pour se réparer, elle a lancé une cagnotte. Merci de l’aider si vous en avez les moyens.

Marguerite Stern

Marguerite Stern est co-fondatrice de Femelliste. Vous pouvez soutenir son travail sur Patreon.

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